Ce séminaire de recherche souhaite reprendre à nouveaux frais la réflexion sur la figure de l’amateur sur le terrain des pratiques culturelles, scientifiques ou politiques s’expérimentant sur Internet ou avec le mobile (impensable l’un sans l’autre désormais). Il y a de fait une actualité de l’amateur à l’heure du dit web 2.0, ce web des usagers qui se nourrit des user generated content. De nombreux débats sur le « culte de l’amateur » (Andrew Keen) alimentent les billets de blogs et leurs commentaires. D’étranges néologismes ont été conçus pour typifier « ceux qui font le web » : Prosumer (Alvin Toffler), ProAm (Charles Leadbeater et Paul Miller), ou encore Produser (Axel Bruns). Ces figures hybrides visent manifestement à subsumer la frontière d’un côté, les amateurs (les usagers d’Internet ) et de l’autre les professionnels d’Internet (mais qui sont-ils au fait ) L’un des enjeux de ce séminaire sera donc de questionner ce grand partage culturel hérité de la modernité entre différentes entités placées, dans le langage même, en relation d’asymétrie : un « amateur » se définit, jusqu’à présent, par rapport à un « professionnel ». A l’aune des pratiques transformatives des natifs digitaux, ces virtuoses de la remixabilité généralisée de la culture contemporaine (Photoshop Contest, parodies sur YouTube…) ou à la lumière des expérimentations de transplantation de la culture du hack et du Do-It-Yourself dans le domaine des techno-sciences (hackbio), il semble opportun de se demander si la figure de l’amateur ne renvoie pas à une « catégorie zombie » (Ulrich Beck) Il s’agira donc de mettre en délibération si la catégorisation « amateur » nous met dans l’incapacité de décrire les pratiques pour elles-mêmes et leurs significations sociales ou si cette figure permet au contraire d’articuler les termes et les enjeux d’une politique de la culture, du savoir et de l’information au temps du numérique Définir les termes et enjeux d’une politique contemporaine de l’amateur suppose de faire histoire et d’inventorier l’héritage de la modernité culturelle du point de vue de ses figures et de leurs environnements technologiques. Ce projet exige un effort d’imagination théorique pour décrire des pratiques et des usages sans les idéaliser afin de nourrir des actions publiques. Enfin, à l’heure du développement d’un capitalisme cognitif, les politiques de l’amateur touchent crucialement à la question d’un droit des publics ainsi qu’à l’économie du crowdsourcing, c’est-à-dire l’utilisation de la créativité, l’intelligence et le savoir-faire des internautes au moindre coût. (indexation et synthèse éditoriale : Pierre Grosdemouge)