Sous la direction de Patricia Ribault, docteur en Arts et Sciences de l’art (Université Paris I Sorbonne). Des premiers gestes de percussion décrits et analysés par Leroi-Gourhan jusqu’aux interfaces tactiles des objets communicants contemporains, le geste fait langage ; autrement dit, il s’inscrit dans une organisation du corps humain et de sa prothéticité indissociable de l’évolution du corps social. Cela signifie qu’il se dépose dans les objets que nous produisons sous forme de traces ouvertes à interprétation, selon un processus que le philosophe italien Luigi Pareyson qualifie de « formativité » : l’union inséparable de production et d’invention. Ce séminaire, qui sera co-parrainé par le Centre d’Histoire des Techniques et de l’Environnement du CNAM et de l’EHESS et par le LETA/CREDE, s’attachera à tracer une technogénèse du geste à travers différentes approches, qu’elles soient historiques, anthropologiques, technologiques, artistiques ou philosophiques. Nous chercherons à comprendre d’une part comment le corps s’inscrit dans la matière à travers la praxis et les œuvres d’artistes, d’artisans, d’ingénieurs ou de designers, et d’autre part, comment ces gestes engendrent des systèmes d’expression communs. Nous tenterons également d’identifier des « temps du geste » par rapport aux grandes structures techniques et sociales qui ont constitué notre histoire et nous porterons une attention particulière à la position de l’artiste, pour qui le geste n’est pas forcément un moyen mais plutôt une fin en soi, l’expression d’une plasticité qui crée du langage par des voies parallèles aux chemins « efficaces » qu’emprunte la technique. Cela nous permettra de mettre en valeur la double dimension de recherche et d’expérimentation propre au geste, entendu comme travail conjoint du corps et de l’esprit et d’envisager de nouvelles pratiques exploratoires des arts et techniques. Enfin, dans le contexte des technologies culturelles actuelles, nous engagerons une réflexion sur la notion de motricité appliquée au numérique ainsi qu’aux « hyper-objets » de notre temps, capables de tracer, d’enregistrer et bientôt de communiquer entre eux de manière tout à fait inédite à ce jour.