Intervenants : Baldine Saint-Girons et Igor Galligo
Selon Marianne Massin, « […] le double caractère subjectif et immédiat [de telles] expériences [esthétiques est aujourd’hui] stigmatisé. Une partie de la philosophie analytique a combattu vigoureusement à la fois le « fantôme de l’expérience esthétique[13]» et le « salmigondis […] de spéculations indisciplinées[14] » du pragmatisme américain qui a mis l’expérience au cœur de sa philosophie. Or un certain nombre d’interrogations font retour avec intensité, ce dont témoigne la production éditoriale de ces dernières années. L’expérience esthétique y est en question[15] – qu’on interroge la légitimité ou la pertinence de la discipline esthétique pour repenser l’expérience[16], qu’on réhabilite cette expérience dans la lignée du pragmatisme et du très influent livre de John Dewey, Art as experience[17][…], qu’on la défende [dans la conception d’André] Malraux[18], qu’on se défie d’un terme trop connoté pour interroger plutôt l’Acte esthétique[19], ou « la conduite esthétique » ou « La Relation esthétique »[20], qu’on se donne pour objet […] la Fin de l’expérience esthétique pour mieux défendre sa nécessaire vitalité et finalité, par-delà la chronique de sa mort annoncée[21], [ou encore que l’on dénonce la destruction de sa possibilité par un conditionnement[22] technique et socio-économique], la liste n’est pas close. L’expérience esthétique est déniée d’un côté, sollicitée de l’autre, réexaminée dans des approches multiples et des perspectives divergentes, entre autres phénoménologiques, pragmatistes et analytiques. [23]» La convergence temporelle de ces écrits témoigne aujourd’hui de la remise en question du concept « d’expérience esthétique », et de sa crise comme voie d’accès cognitif à l’art et à ses attentes sur son efficacité politique (Jacques Rancière). Quelles références peut-on alors encore faire au concept « d’expérience esthétique » pour répondre à l’enjeu politique du musée et des expositions artistiques ?