Centre Pompidou, Salle Triangle, le 12/01/2016 - 17h30.
Intervenants : Jean-Marie Schaeffer et Marianne Massin
L’expérience esthétique implique « une relation d’attention exacerbée à « l’irrésistible et magnifique présence du sensible [24] », écrit Marianne Massin en citant Mikel Dufrenne. « Une telle présence provoque, saisit et sollicite l’attention [du visiteur], l’expérience esthétique intensifie cette attention. […] Cette intensification est inhérente à l’expérience esthétique au sens large. […] Deux caractéristiques peuvent préciser cette intensification. L’attention s’y fait à la fois distinctive et suspensive. Distinctive car une telle expérience distingue un moment et la qualité de ce moment. Cette distinction se double de la mise en acte d’une disponibilité, [le visiteur] n’a donc pas une telle expérience sans y participer activement. […] Une telle expérience est en conséquence suspensive non pas selon des modalités négatives mais par focalisation attentive. [L’expérience esthétique] détache [le visiteur] du flux des évènements alentour, qui s’abandonne à l’incitation première d’une rencontre, mais parallèlement et moins consciemment sans doute, [c’est lui] qui détache cette expérience par un effort pour s’enfoncer en elle. L’expérience (peira) est ici avancée (per) et mise à l’épreuve des limites (peras) [25]». Nous ajouterons avec Jean-Marie Schaeffer la caractéristique « d’une structure intentionnelle qui est la même dans toutes les situations » [esthétiques][26]. Intensification, distinction, suspension et intentionnalité avec l’objet d’art sont ainsi désignées comme les caractéristiques attentionnelles nécessaires à son expérience esthétique. Ces caractéristiques attentionnelles peuvent-elles être encore développées par le visiteur dans le dispositif muséal contemporain, à l’époque des cultures visuelles numériques ?Aussi, la théorisation de l’expérience esthétique peut-elle faire l’économie du rôle joué par la mémoire pour comprendre et défendre l’efficacité de son processus ? C’est ainsi de la possibilité d’une revalorisation critique de la fonction mémorielle dans l’expérience esthétique, dont nous discuterons également lors de cette séance.